Peut on se fier à son intuition en tant que professionnel de l’accompagnement ?
Le coté intuitif de l’accompagnant et l’intuition en tant qu’outil d’accompagnement sont peu évoquées. La lecture est très pauvre à ce sujet sur le versant éducatif. Cette possibilité serait-elle réservée aux accompagnants qualifiés d’holistiques, spirituels ?
Ces dernières années, seules des personnes expérimentées, communément appelées “ vieux de la vieille, vieux loup de mer »” y font référence : “ sers-toi de tes ressentis, si tu sens quelque chose, ce n’est pas pour rien, écoute-toi » ou encore » j’avais comme un sixième sens , j’ai deviné dans ses yeux, au timbre de sa voix…”
Est ce la professionnalisation des métiers de l’accompagnement, l’objectivation attendue de tout acte d’accompagnement qui ont relégué ce sujet au rang de tabou ?
Écouter, se fier, se laisser traverser par son intuition serait alors synonyme d’amateurisme ; une posture non-professionnelle qui ne saurait gratifier tant d’années d’études, honorer l’obtention de tel ou tel diplôme ?
Je suis Mathilde, Mme Raguin, parfois « mon éducatrice » ou « l’éducatrice »… souvent, je n’ai pas de nom, c ‘est selon. Ainsi, je me sers de ce qui se présente dans toute situation. N’entendez-pas que je renie mes qualifications, mes cadres théoriques de pensées et d’interventions. Ce bagage, est pour moi, un socle, mes fondations entres autres.
Souvent, j’observe, j’écoute, je sens, j’entends, je propose, observe les réactions, le corps, les non-dits… et tout ce qui est. Je les mets en relief et en lien avec ce que je nomme mon cadre-socle ( savoirs, références, expériences…) afin d’échanger avec la personne de ce qui est juste pour elle dans son besoin.
A d’autre moment, c’est plus complexe, j’essaye d’objectiver, d’étayer mon coté intuitif pour lui donner une forme plus acceptable, une sorte de consistance. C’est exercice n’est d’ailleurs pas dès plus aisé, puisque cette intuition passe par des canaux sensoriels qui sont les miens. Alors l’information peut être indescriptible, pratiquement intraduisible dans le langage oral commun.
Qui n’a jamais prononcé ces phrases « je le savais, je le sentais », à propos d’un sujet ou d’une situation ?
Aujourd’hui, j’affirme que l’intuition est un outil parmi d’autres au service des accompagnements que j’offre et que sans lui, mes propositions, hypothèses perdraient en justesse, en qualité et en créativité. De mon point de vue, la posture de l’accompagnant ne peut pas être l’unique opération d’une superposition de savoirs sur des situations de vie. L’écoute de l’autre et l’écoute de soi sont intrinsèques à la relation humaine.
Au plaisir de vous lire, à bientôt. Mathilde.
Ces mots me parlent tellement.
25 ans d’expérience dans le travail social, du médico social au sanitaire et à la protection de l’enfance à différents postes, formatrice vacataire, passionnée par l’accompagnement, mon intuition est ma boussole.
Merci pour cet article qui amène réflexion, partage et débat.
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Merci de votre témoignage. Je partage votre idée de boussole.
Pourrions-nous la nommer « boussole intuitive » ? A cet outil hypothético-directionnel, j’ai intégré mes ressentis, mes émotions que je mets en résonnance à ce qui est dit, à la situation afin de tenter d’être au plus juste pour la personne.
Au plaisir d’échanger, Mathilde
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Quel bonheur de lire cet article!
J’ai eu la chance d’être formée pour « un vieux loup de mer », qui n’arrêtait pas de me demander ce que je ressentais, ce que je percevais, de créer en fonction de mon intuition pour proposer autre chose dans l’accompagnement.
Mon expérience professionnelle m’a amené à travailler dans beaucoup de structures différentes où l’intuition n’était pas prise en compte. J’ai du souvent utiliser d’autres méthodes, d’autres outils plus traditionnels pour justifier ce que je savais au départ.
Aujourd’hui de lire cet article me conforte dans l’idée que l’intuition est un véritable outil au même titre que la théorie ou l’expérience, qu’il apporte cette créativité nécessaire dans un accompagnement plus juste.
Merci pour cette prise de position.
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Merci Valérie. Oui, dans ma perception, l’intuition est un outil complémentaire, utilisé mais peu parlé. Alors à nous de l’évoquer, de le partager…
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Bonjour,
Votre réflexion me parle énormément. Je m’étais posé des questionnements similaires au terme d’une recherche sociologique sur les pratiques et postures des travailleurs et travailleuses sociaux. Vous qui dites que la lecture sur le sujet est rare, je me permets de vous indiquer un lien vers mon texte, qui pourrait vous intéresser :
https://www.jlouli.fr/une-science-des-intuitions/
Je serais très intéressé d’avoir votre retour,
Bien cordialement,
Jonathan
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Mathilde, quel plaisir de lire ton article ! Nous sommes si loin de « cet outil » qui loin d’enfermer les personnes que l’on accompagne les humanise : en se servant de ce qu’on ressent, nous pouvons reformuler là ou parfois c’est compliqué pour eux de dire.. Mais pour cela, il faut déjà s’être dit à soi même.. ce qu’il y avait à se dire pour ne pas mélanger notre ressenti avec celui de l’autre… Ca a l’air simple à dire…Mais c’est un cheminement plein de ronces (pour faire référence à un autre de tes articles ^^) et sur lequel il faut soi même aller. Et ainsi ne pas mélanger soi et l’autre… Nos émotions suscitées par l’autre et celles qui nous appartiennent…
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Oui merci de ton post, c’est tout à fait cela et ainsi que j’envisage l’accompagnement. L’essentiel réside dans la beauté de l’humain et de l’humanité, au travers des interactions et liens qu’il tisse avec le monde.
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